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Alimentation et santé

Le mirage de l’industrie de la perte de poids

Par : Gabrielle Tremblay-Baillargeon

Ils attirent les consommateurs par des promesses alléchantes de résultats béton après quelques semaines ou même quelques jours d’utilisation, mais selon les études, les programmes de perte de poids et les produits naturels ne fonctionnent pas ou peu.

Dans les dernières lignes directrices d’Obésité Canada, publiées pour les médecins et la population générale, un chapitre entier est dédié à l’industrie commerciale sur la perte de poids. Marie-Philippe Morin, de la Faculté de médecine et du Centre de recherche de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, Marie-France Langlois, de l’Université de Sherbrooke, et Yoni Freedhoff, de l’Université d’Ottawa, ont épluché la littérature scientifique actuelle afin de rédiger ces recommandations. Attention : celles-ci sont donc conçues pour des patients avec obésité ou en surpoids, qui sont d’ailleurs plus à même de consommer les produits ou les programmes susmentionnés.

L’industrie de la perte et du maintien du poids est énorme : elle devrait atteindre 278,95 milliards de dollars d’ici 2023. « Quand on est désespéré, on n’a pas toujours un jugement éclairé par rapport à tout ce que l’industrie peut offrir », dénote Marie-Philippe Morin, qui cosigne les lignes directrices.

Des produits naturels… et peu efficaces

Aucun produit naturel destiné à la perte de poids en vente libre au Canada (PGX, Garcinia cambogia, extraits de thé vert, picolinate de chrome, chitosane, acide linoléique conjugué et glucomannane) n’a prouvé son efficacité. « Les études qui démontrent leur succès sont de faible qualité méthodologique et réalisées à court terme », mentionne Dre Morin.

Il faut d’abord se rappeler que l’obésité est une maladie chronique, au même titre que le diabète ou l’hypertension. En ligne, comme dans l’écosystème commercial, plusieurs personnes ou entreprises se proclament spécialistes de la perte de poids ou soutiennent détenir des produits ultra-efficaces pour la perte de poids. « Les gens doivent être prudents : des solutions miracles ou des régimes miracles, il n’y en a pas. Il faut aller vers des professionnels de la santé qui peuvent adapter les conseils selon les problèmes du patient », souligne Dre Morin.

Des programmes inégaux

Du côté des programmes de perte de poids, certains peuvent offrir les résultats escomptés, alors que d’autres, non. « Il faut être très vigilant, surtout en ce qui concerne les programmes qui offrent des pertes de poids très importantes de façon rapide, sans beaucoup d’efforts ni de suivi », indique la spécialiste. Le mot d’ordre ? Si ça semble trop beau pour être vrai, c’est que ça l’est probablement.

Certains programmes qui combinent nutrition, exercice physique et soutien comme Jenny Craig®, Nutrisystem®, Optifast® et WW®, eux, peuvent entraîner une perte de poids modeste. « Il y a de bons outils, mais il faut être prudent pour ce qui est des objectifs et de la perte de poids à long terme », souligne Dre Morin. Car on connaît la rengaine : les patients reprennent souvent le poids perdu lorsqu’ils quittent le programme.  « Le facteur numéro un de succès dans les études, c’est l’adhérence », indique-t-elle. Ainsi, les personnes doivent poursuivre le programme entamé aussi longtemps que possible afin de conserver les résultats acquis.

Le soutien professionnel, la clé du succès ?

Pour réussir à maigrir — et à maintenir le nouveau poids qu’indique la balance —, les patients avec obésité ou en surpoids devraient pouvoir bénéficier de soutien auprès de professionnels, comme des nutritionnistes ou des kinésiologues. Malheureusement, le système de santé dans sa forme actuelle n’offre pas l’accès à cet éventail de professionnels : il n’y a bien souvent que le médecin et il ne peut donner qu’un appui limité. « Souvent, les médecins se sentent démunis face à ce qu’ils peuvent offrir aux patients et comme le patient est démuni lui aussi, il va avoir tendance à consommer des produits et des programmes de perte de poids », indique Dre Morin. Pour elle comme pour ses collègues, c’est donc la prise en charge à long terme par une équipe dévouée et non pas les programmes de perte de poids qui peut faire une réelle différence en ce qui a trait à la maladie chronique des patients avec obésité ou en surpoids.